Accords de cessez-le-feu au LAOS 21 Février 1973.
“Accord sur le rétablissement de la paix et la réalisation de la concorde nationale au Laos”.
Afin de répondre aux Augustes voeux de Sa Majesté le Roi et aux aspirations ardentes du peuple de différentes ethnies (1) dans tout le pays qui désirent voir cesser rapidement la guerre, rétablir et maintenir la paix d’une manière durable, réaliser la concorde nationale, unifier la Patrie, édifier le Laos (2) pacifique, indépendant, neutre, démocratique, unifié et prospère pour contribuer positivement à la consolidation de la paix en Indochine et en Asie du Sud-Est (3), Sur la base des Accords de Genève de 1962 et des réalités actuelles au Laos, La Partie du Gouvernement de Vientiane et la Partie des Forces patriotiques ont unanimement convenues de ce qui suit :
CHAPITRE 1 DES PRINCIPES GENERAUX.
ARTICLE 1.
a) La volonté du peuple lao est de préserver et d’appliquer résolument ses droits nationaux fondamentaux sacrés (4) et inviolables tels que : l’indépendance, la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale (5) du Laos.
b) La Déclaration sur la neutralité du Laos en date du 9 juillet 1962 et les Accords de Genève de 1962 sur le Laos sont des bases correctes pour la politique étrangère de paix, d’indépendance, de neutralité du Royaume du Laos ; les parties lao intéressées, les Etats-Unis d’Amérique, la Thaïlande et les autres pays étrangers doivent les respecter et les appliquer rigoureusement.
Les affaires intérieures (6) du Laos doivent être réglées par les laos eux-mêmes, sans ingérence des pays étrangers.
c) Dans le noble but de rétablir la paix, consolider l’indépendance, réaliser la concorde nationale et l’unification de la Patrie, du fait que dans les réalités actuelles au Laos, il existe deux zones contrôlées séparément par les deux parties (7), les problèmes intérieurs (8) du Laos (9) doivent être réglés dans l’esprit de concorde nationale, suivant les principes d’égalité entre les parties, de respect mutuel, sans que l’une des parties puisse contraindre et annexer l’autre.
d) Afin de préserver l’indépendance et la souveraineté nationales, réaliser la concorde nationale et l’unification de la Patrie, il faut appliquer rigoureusement les libertés démocratiques (10) du peuple, lesquelles comprennent : la liberté individuelle, la liberté de croyance, la liberté de parole, la liberté de presse, la liberté de réunion, la liberté de créer des partis et organisations politiques, la liberté de se porter candidat aux élections et la liberté d’élire, la liberté de déplacement, la liberté de résidence, la liberté d’entreprise (11) et le droit de propriété privée ; il faut abroger toutes les lois, tous les règlements et tous les organismes qui sont contraires aux dites libertés.
CHAPITRE II CLAUSES MILITAIRES.
ARTICLE 2.
A partir de 12 heures (heure de Vientiane) du 22 février 1973,sera appliqué un cessez-le-feu sur place, total et simultané sur tout le territoire lao, lequel comprendra le mesures suivantes :
a) Les pays étrangers mettent complètement et définitivement fin à tous leurs bombardements sur tout le territoire lao, mettent fin à toutes leurs interventions et agressions à l’encontre du Laos et mettent fin à toutes sortes d’engagements militaires (12) de leur part au Laos.
b) Les forces armées des pays étrangers mettent complètement et définitivement fin à toutes leurs activités militaires au Laos.
c) Les forces armées de toutes les parties lao metten définitivement fin à toutes leurs activités militaires qui constituent des hostilités terrestres et aériennes (13).
ARTICLE 3.
Dès l’entrée en vigueur du cessez-le-feu :
a) Sont absolument interdites toutes les activités d’attaque, d’empiétement, de menace ou de violation militaires terrestres ou aériennes de l’une des parties contre la zone provisoirement sous le contrôle de la partie adverse.
b) Sont absolument interdits tous les actes militaires hostiles, y compris les activités des bandits, des commandos et les activités armées et d’espionnage sur terre et dans l’air ; au cas où l’une des parties désire ravitailler en vivres ceux qui relèvent d’elle en passant par la zone sous contrôle de l’autre partie, la commission mixte (14) d’exécution des accords en discutera et définira d’un commun accord (15) les modalités précises de ce ravitaillement.
c) Sont absolument interdites toutes les opérations de nettoyage, de terreur, de répression, d’atteinte à la vie et aux biens de la population et tous actes de représailles discrimination à l’encontre des personnes ayant collaboré avec la partie adverse pendant la guerre ; aider les habitants réfugiés qui ont été obligés de quitter leurs villages d’origine pendant la guerre à y retourner librement pour y gagner leur vie selon leur désir.
d) Est interdite l’introduction au Laos de toutes sortes de personnel militaire de toutes catégories de troupes régulières et irrégulières ainsi que toutes sortes d’armement et de matériel militaires des pays étrangers (16), à l’exception de ceux qui sont stipulés dans les Accords de Genève de 1954 et de 1962. Au cas où il s’avère nécessaire de procéder au remplacement d’armement et du matériel militaire endommagés et usés, les deux parties en discuteront et en décideront d’un commun accord.
ARTICLE 4.
Dans un délai (17) de 60 jours à partir de la date de la formation du Gouvernement provisoire d’Union nationale et du Conseil consultatif politique nationale, le retrait hors du Laos du personnel militaire, de troupes régulières et irrégulières étrangères et le démantèlement des organismes militaires et para-militaires des pays étrangers doivent être achevés complètement.
Les “Forces spéciales” organisées, armées, instruites et commandées par l’étranger doivent être liquidées ainsi que toutes les bases, installations (18) et positions de ces forces spéciales.
ARTICLE 5.
Chacune des deux parties lao procédera à la remise à l’autre partie de toutes les personnes, sans distinction de nationalités, qui ont été capturées et incarcérées pour avoir collaboré avec la partie adverse pendant la guerre.
Cette remise sera réalisée conformément aux modalités fixées en commun par les deux parties, et au plus tard dans les 60 jours à compter de la date de la formation du Gouvernement provisoire d’Union nationale et du Conseil consultatif politique national.
Après la remise complète des personnes capturées, chaque partie a l’obligation de rechercher et fournir à l’autre partie des informations sur les personnes disparues pendant la guerre.
CHAPITRE III CLAUSES POLITIQUES.
ARTICLE 6.
Il sera procédé à des élections générales suivant les principes de liberté et de démocratie véritables (19) en vue d’établir l’Assemblée nationale et le Gouvernement d’Union (20) nationale définitif, représentants authentiques du peuple de toutes les ethnies de tout le Laos. Les modalités et la date des élections générales (21) seront fixées d’un commun accord par les deux parties.
En attendant que les élections générales puissent être organisées (22), les deux parties formeront un nouveau (23) Gouvernement provisoire d’Union nationale et un Conseil consultatif politique nationale au plus tard dans les 30 jours à partir de la date de la signature du présent accord afin de réaliser les accords signés et gérer les affaires du pays.
ARTICLE 7.
Le nouveau Gouvernement provisoire d’Union nationale comprend des Représentants de la Partie du Gouvernement de Vientiane et de la Partie des Forces patriotiques en nombres égaux et de deux personnalités qui sont pour la paix, l’indépendance, la neutralité, la démocratie ; ces deux personnalités seront choisies d’un commun accord par les deux parties ; le future Premier ministre ne sera pas compris dans les deux nombres égaux de Représentants des parties. Le Gouvernement provisoire d’Union nationale sera formé suivant une procédure spéciale par l’investiture directe (24) de Sa Majesté le Roi ; il fonctionne suivant le principe d’unanimité entre les deux parties, a pour tâche d’exécuter les accords signés et le programme politique adopté d’un commun accord par les deux parties, notamment réaliser le cessez-le-feu (25), préserver d’une manière durable la paix, appliquer intégralement les libertés démocratiques du peuple, pratiquer une politique extérieure de paix, d’indépendance et de neutralité, coordonner les plans d’édification économique, de développement culturel, recevoir et répartir l’aide commune accordée au Laos par les divers pays.
ARTICLE 8.
Le Conseil consultatif politique national, organisme de concorde nationale, est composé de Représentants de la Partie du Gouvernement de Vientiane et de la Partie des Forces patriotiques en nombres égaux et d’un certain nombre de personnalités qui sont pour la paix, l’indépendance, la neutralité et la démocratie, nombre à déterminer d’un commun accord par les deux parties; il fonctionne suivant le principe d’unanimité entre les deux parties et a pour tâches de :
a) discuter des grands problèmes touchant aux lignes politiques intérieure et extérieure du pays et présenter des vues concernant ces problèmes au Gouvernement provisoire d’Union national ;
b) activer et aider le Gouvernement provisoire d’Union nationale et impulser et aider les deux parties dans l’application des Accords signés (26) afin de parachever la concorde nationale ;
c) examiner et adopter ensemble les lois et règlements relatifs aux élections générales et collaborer avec le Gouvernement provisoire d’Union nationale dans l’organisation des élections générales en vue d’installer l’Assemblée nationale et le Gouvernement d’Union nationale définitif (27).
La procédure pour instituer le Conseil consultatif politique national est la suivante : les deux parties en discutent en délai et prennent une décision commune à ce sujet ; puis transmettent cette décision au Gouvernement provisoire d’Union nationale qui la soumettra à Sa Majesté le Roi pour l’investiture. La même procédure sera adoptée pour la dissolution du Conseil consultatif politique national.
ARTICLE 9.
Les deux parties sont convenues de neutraliser la ville de Luang Prabang et la capitale (28) Vientiane et de chercher par tous les moyens à assurer la sécurité et le fonctionnement efficace du Gouvernement provisoire d’Union nationale et du Conseil consultatif politique national, d’empêcher tout sabotage ou pression de toutes les forces venant de l’intérieur ou de l’extérieur.
ARTICLE 10.
a) En attendant l’élection de l’Assemblée nationale et l’établissement du gouvernement d’Union nationale définitif, dans l’esprit de l’article 6 de la 2ème partie du communiqué commun de Zurich en date du 22 juin 1961, chaque partie conservera la zone provisoirement sous son contrôle et s’efforcera d’appliquer le programme politique du Gouvernement provisoire d’Union nationale, programme adopté d’un commun accord par les deux parties.
b) Les deux parties activent la réalisation des relations normales entre les deux zones, créent des conditions favorables permettant aux populations de circuler, de chercher les moyens d’existence, de se rendre des visites, de procéder à des échanges économiques, culturels et autres visant à consolider la concorde nationale afin de réaliser rapidement l’unification du pays.
c) les deux parties prennent acte de la déclaration du Gouvernement des Etats-Unis d’Amérique selon laquelle les Etats-Unis d’Amérique apporteront leur contribution au pansement des blessures de guerre et à l’oeuvre d’édification (29) d’après-guerre en Indochine. Le Gouvernement d’Union nationale discutera avec le Gouvernement des Etats-Unis d’Amérique de cette contribution en ce qui concerne le Laos.
CHAPITRE IV DE LA COMMISSION MIXTE POUR L’EXECUTION DES ACCORDS ET DE LA COMMISSION INTERNATIONALE DE SURVEILLANCE ET DE CONTROLE.
ARTICLE 11.
Dans l’exécution du présent accord, la responsabilité incombe principalement aux deux parties intéressées du Laos. Les deux parties établissent immédiatement une Commission mixte (30) pour l’exécution des accords avec des Représentants en nombres égaux. La Commission d’exécution des Accords entre immédiatement en action dès que le cessez-le-feu sera effectif.
La Commission d’exécution des accords fonctionne suivant le principe de discussion et de décision prise à l’unanimité.
ARTICLE 12.
La Commission Internationale de Surveillance et de Contrôle établie suivant les Accords de Genève de 1962 sur le Laos, composée de délégués indiens, polonais et canadiens avec le délégué indien comme Président, poursuit ses activités conformément aux tâches, pouvoirs et principe de travail tels qu’ils sont stipulés dans le Protocole des dits Accords de Genève.
CHAPITRE V AUTRES DISPOSITIONS
ARTICLE 13.
La Partie du Gouvernement de Vientiane et la Partie des Forces patriotiques s’engagent à exécuter le présent accord et à poursuivre les négociations en vue de réaliser toutes les clauses déjà convenues et régler les problèmes en suspens ayant trait aux deux parties, dans un esprit d’égalité et de respect mutuel afin de mettre fin à la guerre, restaurer et préserver la paix d’une manière ferme et durable, réaliser la concorde nationale, réaliser l’unification nationale (31), pour parvenir à édifier le Laos en un pays pacifique, indépendant, neutre, démocratique, unifié et prospère.
ARTICLE 14.
Le présent accord entre en vigueur à partir de la date de la signature.
Fait à Vientiane, le 21 février 1973, en langue lao et en 5 exemplaires (32), l’un des exemplaires sera transmis à sa Majesté le Roi, chaque partie en conserve un exemplaire, le Gouvernement provisoire et le Conseil consultatif politique nationale en garderont chacun un exemplaire dans leurs archives.
Le Représentant de la Partie des Forces patriotiques,
Phagna Phoumi VONGVICHIT,
Représentant Extraordinaire et Plénipotentiaire des forces patriotiques.
(*) Par ailleurs, ce texte a été publié par le “Bulletin d’information du G.R.P. de la R.S.V.N.”, Paris, N° 10, 10 mars 1973. Ne sont indiquées ci-dessous que les principales variantes constatées entre la présente traduction et d’autres traductions françaises officieuses provenant de sources différentes.